Hétéro, homo... Tout le monde devrait pouvoir choisir librement le type d’union qui lui convient. Il n’en reste pas moins que le mariage a longtemps été synonyme de contrainte, de soumission et d’enfermement pour les femmes. Certes, la notion de chef de famille a disparu en 1970. L’épouse peut conserver son nom de naissance, ou ajouter celui de son mari, qui peut d’ailleurs lui-même renoncer à son nom pour prendre celui de sa femme si ça lui chante. Mais si le droit est de notre côté, la pratique tarde à se mettre au diapason, et on devient vite « femme de » alors que lui ne deviendra jamais « mari de ». Autre bémol : l’âge du mariage est de 15 ans pour les femmes et de 18 pour les garçons. Mineure, la jeune fille a alors besoin du consentement de ses parents, et ne peut guère s’opposer aux pressions dont elle serait éventuellement victime en cas, par exemple, de mariage forcé.
Pour le meilleur et sans le pire ?
Autant dire que l’attrait du mariage est faible pour celles qui entendent vivre et aimer librement, sans exclusive et sans devoir. La solidarité maritale a en revanche quelque chose de rassurant, en ces temps de précarité sociale : un couple marié est mieux armé face à l’adversité, et les statistiques démontrent d’ailleurs que le mariage assure une plus grande longévité… aux hommes. Il est vrai que le partage des tâches ménagères étant ce qu’il est, ils ont plus à y gagner. Enfin, le divorce, qui dans 40% des cas vient sonner le tocsin des unions maritales, a de quoi rendre prudent-e. Les tourtereaux de Bègles, comme les 4 000 mariés de Californie, n’ont pas fini d’explorer les délices de cette forme de rupture, souvent synonyme d’appauvrissement, voire de dégringolade sociale.
Le PACS, voté en 1999, a donné lieu depuis lors à la signature de 103 447 contrats (fin 2003). On est loin du raz-de-marée attendu… et très loin des 280 000 mariages célébrés chaque année. Et pour cause : âprement discuté, dans un contexte d’homophobie odieux, ce texte ne constitue pour beaucoup qu’un pis-aller, une sorte d’union de seconde zone signée en catimini au Tribunal, et fiscalement efficace au bout de deux ans seulement. Il était logique que des couples homosexuels partent à l’assaut du mariage, même si l’on serait tenté-e, en tant que féministe, de défendre une troisième voie, franchement égalitaire, débarrassée de relents religieux ou patriarcaux : l’union libre, accessible à tous et à toutes quel que soit le sexe, qui devrait ouvrir des droits plus importants à chacun des partenaires. Union et libre ? Oui, ces deux mots vont décidément très bien ensemble.
Comment ça marche
Le mariage
Les conditions : mixité (homme/femme), âge de 15 ans pour les femmes et 18 ans pour les garçons, consentement mutuel (le mariage forcé est donc interdit), publicité (publication des bans), monogamie (si on veut plusieurs maris, il faut se marier plusieurs fois). Le mariage est également interdit entre parents proches.
Les devoirs : Les deux époux s’obligent à une communauté de vie, et assurent ensemble la conduite de la famille. Car les conjoints sont censés avoir des relations sexuelles (leur absence prolongée et délibérée est un motif de divorce) et des enfants. Ils se doivent fidélité, secours et assistance. En cas de divorce, l’infidélité est appréciée par les juges en fonction du contexte, et ne constitue pas obligatoirement une « faute ». Le secours n’exige pas de passer son brevet de secourisme, seulement de se montrer solidaire envers son conjoint, moralement et matériellement, quitte à payer ses dettes ou à lui chanter une jolie chanson tous les soirs en cas de dépression chronique. Quant à l’assistance, elle suppose de subvenir aux besoins de l’époux ou de l’épouse si celui-ci ou celle-ci ne peut pas le faire.
Les droits : fiscalité commune, droit au versement du capital décès et d’une pension de reversion pour le conjoint survivant, communauté de biens (sauf contrat de mariage spécifique), droit automatique d’hériter un quart des biens du conjoint, abattement de 76 000 euros pour les droits à payer sur l’héritage.
La rupture : c’est le divorce, aujourd’hui possible par consentement mutuel ou unilatéralement, mais avec des restrictions pour ne pas léser le conjoint qui se trouverait démuni du fait de la rupture.
Les chiffres : 280 000 mariages par an environ. 40% d’entre eux finiront par un divorce, ce qui fait encore 60% de mariages « pour la vie ». En tout, 25 millions de Français sont mariés.
L’union libre
Les conditions : le code civil reconnaît le concubinage à l’article 518-8 comme « une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes de même sexe ou de sexe différent qui vivent en couple. »
Les devoirs : la seule obligation est la vie commune.
Les droits : avec un certificat de concubinage, on peut bénéficier de la couverture sociale de son concubin ou de sa concubine. Mais les droits des concubins concernent surtout leur statut éventuel de parent et les conditions dans lesquelles ils peuvent exercer conjointement ou non leur autorité sur l’enfant qu’ils ont conçu. La transmission du patrimoine est possible par testament, avec un abattement de 1 500 euros sur les droits à payer pour l’héritage du conjoint.
La rupture : elle ne donne lieu à aucune procédure particulière si elle n’est pas assortie d’une faute (promesse de mariage fallacieuse, violence, etc.) entraînant, éventuellement, réparation.
Les chiffres : 5 millions de Français vivent en concubinage. 40% des enfants nés en France sont le fruit d’une union libre.
Le Pacs (Pacte Civil de Solidarité)
Les conditions : être adulte et majeur-e, de même sexe ou de sexe différent, non marié-e. Comme le mariage, le PACS n’est pas possible entre parents proches (frères, sœurs, oncles, tantes…).
Les devoirs : la vie commune, la solidarité mutuelle entre les partenaires, avec obligation de payer les dettes de l’autre quand elles relèvent de la vie courante, et le partage. Les biens achetés durant le PACS appartiennent aux deux. On appelle ça la présomption d’indivision (rien à voir avec la présomption d’innocence).
Les droits : on peut être unis fiscalement (c’est vrai que c’est excitant) au bout de deux ans, bénéficier du capital décès du partenaire décédé, et rester dans le logement que l’on partageait avec elle ou lui. En matière de succession, on peut bénéficier d’un abattement de 57 000 euros sur les droits à payer pour l’héritage du conjoint. Mais un testament est obligatoire pour valider cet héritage.
La rupture : d’un commun accord par déclaration conjointe au greffe du tribunal d’instance, ou unilatérale avec signification au greffe.
Les chiffres : 103 447 couples se sont « pacsés » depuis 1999, dont 30 800 en 2003. On compte 1 PACS pour 10 mariages.
Paru dans Clara-magazine n°85, septembre 2004
http://www.clara-magazine.fr