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Europe du Nord : les clés du succès

dimanche 1er octobre 2000, par Nicolas Bégat



Les pays nordiques restent ceux où la proportion de femmes au Parlement est la plus forte. Phénomène naturel ou politique adéquate ?


En Europe du Nord, on compte 36,4% de femmes en moyenne dans les parlements. La Suède arrive en tête avec 40,4% de femmes dans sa chambre basse et unique, d’après le dernier rapport de l’ONU. D’autres chiffres font état de 149 sièges détenus par des femmes sur les 349 de la chambre suite aux élections de septembre 1998. Le Danemark arrive en deuxième position selon ces mêmes chiffres avec 37,4% de femmes dans la chambre unique, suivi de la Finlande avec 36,5%, de la Norvège avec 36,4%, des Pays-Bas avec 36% dans la chambre basse et 26,7% dans la chambre haute, puis de l’Islande avec 34,9%. On chute à 30,9% avec le suivant : l’Allemagne. Par comparaison, la France arrive bien loin derrière en 58e position. De nombreux facteurs expliquent ces chiffres dans les pays nordiques, comme l’égalité d’accès à l’éducation, la responsabilisation des femmes face à leur devoir de citoyenne, mais aussi la mise en place de politiques nationales visant à concilier vie de famille et responsabilités professionnelles, tant pour les femmes... que pour les hommes.

L’exemple de la Suède : un modèle à suivre ?

En Suède, on compte 49% de salariées et 51% de salariés (mais attention, beaucoup de femmes choisissent le temps partiel soit qu’elles en aient les moyens, soit qu’elles ne privilégient pas leur carrière professionnelle ; ainsi les femmes sur le marché de l’emploi ne représentent que 40% des heures travaillées). Mais on a aussi l’un des taux de natalité les plus importants d’Europe (1,5 contre 1,4 pour la moyenne européenne). Comment est-ce possible ? Sans doute, déjà, parce que dans ce pays, quand on parle de politique familiale, on s’adresse bien à la famille (pas seulement dans les mesures, mais aussi en terme de communication des mesures prises) et pas seulement aux femmes. Les pères ont jusqu’à 10 jours à prendre suite à la naissance de leur enfant. Ils peuvent alors décider de reprendre le travail... ou non ! En effet, l’un ou l’autre des parents, peut en effet profiter à plein temps, pendant 450 jours, de sa progéniture avant d’exercer à nouveau son activité professionnelle. Et si, il est vrai, dans 90% des cas, c’est la maman qui opte pour ce congé, payé à 75% du dernier salaire pendant 9 mois, une mesure oblige le père à prendre un mois minimum pour s’occuper de son enfant. Il bénéficie à son tour pendant cette période du congé parental. Par ailleurs, au niveau des modes de garde, la politique menée depuis le milieu des années 90, permet d’accueillir tous les enfants en crèche.... jusqu’à l’âge de 6 ans. Le délai d’attente ne peut dépasser 4 à 5 mois.
Autre point important qui peut contribuer à expliquer ces chiffres, la prise de conscience par les hommes de l’intérêt d’avoir un équilibre entre les sexes dans la vie publique. Ainsi, dans les actes du colloque " Les femmes européennes et la citoyenneté " de mars 1996, Kristina Persson, préfète de région en Suède explique : " Loin de devenir des activistes pour les droits des femmes, il est significatif de constater que les hommes au pouvoir ont peu à peu accepté l’idée d’un équilibre entre les sexes, comme quelque chose de souhaitable, principalement dans la vie publique. Dans la vie professionnelle, un intérêt croissant pour la " valorisation des femmes " se fait jour. Non seulement en regard d’un argument économique, qui donne raison au mode de fonctionnement d’organisations mixtes, mais aussi parce que " les femmes sont souvent de meilleurs chefs que les hommes " ".

Le succès est-il complet ?

Ces chiffres sont-ils pour autant synonymes de succès et donc de modèles à suivre ? Kristina Persson rappelle que malgré ces évolutions, les domaines où se cache le vrai pouvoir, à savoir l’économie, le monde de la finance, les grandes entreprises et les mass média sont toujours dominés par des hommes. Par ailleurs, sur le marché de l’emploi, la ségrégation des femmes perdure. Ainsi, si l’égalité existe d’un point de vue formel, il reste beaucoup à faire lorsqu’on procède à une analyse effective de cette " égalité " entre hommes et femmes.
Sans doute que pour la phase 1 de l’accès des femmes au pouvoir, les mesures prises en Suède donnent un plus pour sa réalisation, à savoir, plus de femmes, voire autant de femmes que d’hommes aux postes de décision... mais pour la phase 2 qui voudrait que la situation des femmes s’améliore en général car mieux prise en compte par les femmes au pouvoir, il reste du chemin à parcourir.

P.-S.

Elsa Boulet

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