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Pères, tête en l’air ?

lundi 28 juillet 2008, par David Boutigny

L’été est chaud. Pas de canicule mais de vrais risques de souffrir de déshydradation et d’insolation, en particulier pour les personnes âgées et les enfants. Justement, parlons-en ! Deux enfants oubliés en plein soleil dans la voiture par leurs pères respectifs viennent de trouver la mort.

Certes il ne serait pas juste de juger les pères à partir de "faits divers", comme les deux cas d’oubli d’un enfant en bas âge dans une voiture par leur papa tête en l’air, tout préoccupé par des choses sérieuses comme le travail qui les attendait dans la journée. Deux "faits divers" qui ont eu lieu au cours de ce mois de juillet et qui ont abouti à la mort de deux fillettes de 2 à 3 ans. Les enfants sont morts, les pères sont "choqués", les mères en pièces détachées ! Pour deux cas, me direz-vous il ne faut pas tirer de conclusions hâtives, tenter de généraliser ce qui serait un accident individuel. D’accord, admettons. Mais prenons l’hypothèse que ce soit la mère qui ait laissé le bambin sur le siège arrière de son véhicule et qui ait filé au bureau ou à la boutique, les neurones déjà branchés sur la dure journée de labeur qu’elle devait affronter. On entend déjà les commentaires sur "l’instinct maternel" pris à défaut. Mère indigne, comme l’irresponsable de 20 ans qui avait laissé son bébé dormir dans la voiture pendant qu’elle allait danser en boîte avec des copines (fait divers de début juillet) ! Pour les pères c’est pas pareil. Pas de hurlement sur l’instinct paternel. Certes "on" cherche à comprendre comment c’est possible qu’en garant la voiture le conducteur ne voie pas dans le rétro la fillette assise dans son réhausseur. Comment, en se garant, le regard ne traîne pas à l’arrière du véhicule. Techniquement, certains expliquent que c’est possible, en fonction de la configuration de la voiture, de la hauteur des sièges avant, etc. Mais la vraie question, au fond, n’est-elle pas comment et pourquoi l’enfant peut sortir de la tête du père, alors qu’il est responsable de déposer les enfants chez la nourrice ou à la halte garderie. Le premier père se laisse envahir par un accident de la route qui se produit devant ses yeux. Civique, il assiste la personne accidentée. Normal, en plus il est pharmacien. Ça crée des réflexes de protection et d’assistance des autres. Sauf qu’après il zappe sa fille. Pfouit. Sortie de la tête. Il file à la pharmacie. Le second père dépose son garçon, le plus grand de ses deux enfants, mais il a omis de déposer la plus jeune. Zou. Direction le boulot, fermeture des portes, pleine concentration sur le travail. Et pas un neurone de signal durant toute la journée qui l’alerterait. Un peu comme si la vie au boulot ne croisait pas celle de la vie familiale. Mondes cloisonnés. Mémoire divisée. Recoupements interdits. Oui, c’est sans doute réel et sincère. Ces deux papas choqués ont oublié. En toute bonne foi. Parce que le fonctionnement des pères et des mères diffère, en profondeur. Socialement, j’entends. Au boulot, maman pense aux enfants ; ses journées elle les organise avec tous les paramètres, enfants compris. Papa est plus limité, visiblement. C’est vrai qu’il est rare que la crèche ou l’école lui passe un coup de fil pendant les heures de travail pour l’informer que bébé a de la fièvre, que le moyen s’est tordu la cheville au cours de sport et qu’il faut venir les chercher, là, le plus rapidement possible. Maman négocie au boulot. C’est rare (encore trop rare) qu’elle dérange le papa au travail pour lui demander de lâcher tout et de filer récupérer l’enfant. Maman jongle toute l’année. Papa dépanne de temps à autres. Alors, bien sûr, les réflexes ne sont pas établis quand on n’est pas dans l’habitude. Au moins une chose que ces deux cas terribles montrent, s’il en était besoin. Finalement, dites moi, ils sont où les nouveaux pères, les pas comme avant ?

P.-S.

Michèle Dessenne

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