Au XIXe siècle, le Rwanda était un royaume. Et il semblerait que les termes « hutus » et « tutsis » étaient déjà en vigueur à cette époque. Mais ils désignaient alors moins des ethnies que des classes sociales. En effet, être « tutsi-e-s » était comparable à être noble, c’est-à-dire de la classe dirigeante des guerriers et des éleveurs en opposition à celle des cultivateurs hutus. Il semblerait également que ces catégories n’étaient pas totalement étanches, du moins aux origines, et qu’il y avait moyen, en cas de fortune ou d’infortune, pour un-e Hutu-e de devenir Tutsi-e et pour un-e Tutsi-e de devenir Hutu-e. Ce n’est qu’avec la colonisation, allemande dans un premier temps, mais surtout belge dans un second, que ces catégories se figèrent, et devinrent « ethniques ». En effet, les colons croyaient distinguer des caractéristiques physiques spécifiques à chacune des catégories hutues et tutsies. Il faut dire que nous sommes dans l’entre-deux Guerres et que l’essentialisme racial est à la mode. L’autre intérêt des colonisateurs est de diviser pour mieux règner. Flattant la classe dirigeante tutsie, les colons s’assurent leur collaboration et la main-mise sur les Hutus. Mais lorsque les Tutsis, qui ont bénéficié d’une formation délivrée par les colons, ont des vélléités d’indépendance, les colons s’allient alors avec les Hutus en propageant l’idée que les Hutus sont opprimés par les Tutsis depuis trop longtemps. Mais, cette politique ne servira qu’à exacerber la haine : les Hutus, en 1959, renversèrent le roi tutsi en place, provoquant l’exode massif d’une grande partie de la population tustie. Ils obtinrent ensuite l’indépendance en 1962 et créèrent une république hutue.
Le Génocide
« Si les Inkotanyi (rebelles FPR) n’avaient pas conquis le pays, pour nous mettre en fuite, on se serait entre-tués à la mort du dernier Tutsi, attrapés qu’on était par le délire de leurs parcelles à partager. On ne pouvait plus s’arrêter de lever la machette, tellement ça nous rapportait » [1].
Lors des commémorations organisées le 5 avril 2004 à Kigali, Robert Bayiagamba, ministre de la jeunesse et des sports déclarait que le nombre recensé de personnes tuées durant le génocide s’élevait à 937 000. Commencé dès le lendemain de l’assassinat du président Habyarimana, le 6 avril 2004, le génocide aura donc fait près d’un million de morts en une centaine de jours.
1990 : Une guerre civile oppose le gouvernement de Juvenal Habyarimana aux rebelles FPR (Front patriotique rwandais) qui ne sont autres qu’une partie des descendants des Tutsis exilés lors des révoltes hutues de 1959.
1993 : Des accords de paix sont signés entre le gouvernement rwandais et les rebelles FPR.
1994 : Le clan du président Habyarimana résiste et tarde à appliquer les accords de paix d’Arusha. Le 6 avril, l’avion de président est abattu. A l’heure actuelle, les responsables de cet attentat ne sont toujours pas connus. Certains pensent que ce sont des rebelles FPR qui ont fait le coup, d’autres, et cette thèse semble un peu plus sérieuse, que c’est le clan du président lui-même qui aurait fomenté cet attentat. Dès le lendemain de la mort du président, le Premier ministre et le président de la Cour constitutionnelle sont assassinés et les premiers massacres commencent. Le surlendemain, les massacres s’étendent à tout le pays. A la mi-mai, le nombre de Tutsi-e-s et de Hutu-e-s modéré-e-s massacrés s’élèvent déjà selon l’ONU à 500 000 morts. Pendant ce temps, l’armée du FPR a repris les combats et avance en direction de Kigali, qui tombe le 4 juillet. L’avancée de l’armée FPR provoque un afflux de centaines de milliers de réfugiés vers les pays limitrophes. Le rôle de la communauté internationale durant tout le génocide n’a cessé d’être trouble. Le 13 avril, au plus fort des massacres, la Belgique décide de retirer ses troupes laissant sans protection des milliers de gens venus trouver refuge à leur quartier général, la plupart périront. Le 21 avril, l’ONU réduit sa mission d’aide au Rwanda de 5500 casques bleus à 270. Quant à la France, accointée avec le gouvernement Habyarimana, elle a semble-t-il regardé les miliciens achever les personnes qu’elle était censée protéger dans le cadre de l’Opération Turquoise par peur d’une prise de pouvoir FPR.
Le Rwanda en quelques dates
[2]
1931 : Introduction de la carte d’identité rwandaise mentionnant l’ethnie
1959 : Révoltes paysannes hutues qui provoquent l’exode de centaine de milliers de Tutsis
1962 : Indépendance du Rwanda
1963 : Premier massacre d’envergure de Tutsis par les militaires dans la région de Nyamata
1973 : Coup d’Etat du major Juvenal Habyarimana
1990 : Les Tutsis exilés en 1959 attaquent le Rwanda à partir de l’Ouganda
1993 : Accord de paix d’Arusha entre le gouvernement rwandais d’Habyarimana et les forces
FPR
1994
6 avril : Assassina du président Habyarimana
7 avril : Début du génocide qui durera une centaine de jours
4 juillet : Les troupes FPR atteignent la capitale Kigali
2003
Mai : Adoption par referendum de la nouvelle Constitution rwandaise par 93% des votants
Septembre : Premières élections, après la période de transition post-génocidaire, du Parlement rwandais composé de l’Assemblée nationale et du Sénat
Le Rwanda en chiffres
Superficie : 26338 km2
Population : 8.2 millions d’habitants
Croissance démographique : 1.7%
Population de moins de 15 ans : 45,3%
Espérance de vie : 39,8 ans
Mortalité infantile : 9,6%
Alphabétisation : 68%
Peuplements : Tutsis, Hutus, Twas
Religions : Chrétienne et musulmane
Revenu national brut par habitants : 250$