Les Feminist dialogues furent inaugurés l’année dernière à Mumbai.Cette année, ils se tenaient les 23, 24 et 25 janvier, ici-même à Porto Alegre.
Pourquoi avant l’ouverture du FSM ? Non pour rester protégées dans le cocon de la non-mixité, mais au contraire pour se préparer à descendre dans l’arène du non-féminisme.
Il ne s’agit pas de parler d’une seule voix : non seulement cela ne semble guère pensable, mais encore contredirait le respect de la diversité qui, en tant que principe du moins, s’inscrit dans les traditions du féminisme. Mais pour faire passer efficacement ne serait-ce que le message de base ("On est toujours là, on pense et on a des propositions") auprès de mouvements sociaux qui ne nous ont pas toujours identifiées comme alliées (ou a minima comme interlocutrices), il serait ingénieux d’élaborer des stratégies collectives.
En taisant les différends, voire en écrasant les dissidences, façon comité central ? Non, en les mettant sur le tapis entre féministes de tous sexes.En (r)ouvrant les débats de fond pour redéfinir les enjeux. En traquant sans pitié, mais sans aigreur, les écueils qui ont pu affaiblir les mouvements des femmes. En bâtissant des ponts entres les générations et partant à la rencontre de toutes les femmes (on appelle ça, démocratiser). En nous lançant à la reconquête de notre radicalité et de notre pêche d’enfer pour redevenir porteuses d’utopies. Et, plus inventives que jamais, revenir sur le devant de la scène avec un projet politique convaincant - et les moyens de convaincre.
Bref, les Feminist dialogues proposent ni plus ni moins de repenser le féminisme. Si, comme on s’en doute, l’objectif ne fut pas atteint en trois jours, même dans ce microcosme d’une centaine de personnes, des pistes intéressantes furent ouvertes à la réflexion...
Masculin/féminin
Repenser le féminisme serait-ce repenser le féminin ? En effet, si les féministes définissent le féminin uniquement à partir du corps de la femme ou encore décident de limiter leur espace d’action aux femmes, le mouvement pourrait y perdre sa dynamique. Limiter l’espace d’action aux femmes, c’est exclure les travestis et les hommes féministes. Et par ailleurs, agir de cette manière ne permet pas réellement d’impulser un véritable changement de société. Si l’on apparente la dualité homme/femme à la dualité masculin/féminin, on refuse de reconnaître la part de féminin des travestis et celle de la gente masculine. N’est-ce point reproduire les schèmes du patriarcart ? Si le féminisme existe, c’est notamment pour défendre le droit des femmes à disposer de leur corps, de leur choix de vie, et donc de refuser le modèle sociétal de distinction du masculin/féminin.
Et cela a des répercussions sur les hommes- car comment changer l’idée de féminin sans modifier celle du masculin ? Personne ne remit pourtant en cause la non-mixité de certains groupes féministes, ou de certaines rencontres. Il s’agissait juste de montrer les dangers d’une marginalisation volontaire.
Alliance n’est pa fusion
Sur certaines questions, des féministes se trouvent plus proches des mouvements sociaux que d’autres féministes.Eh ! oui, bien que le féminisme ait vocation à agir de façon transversale, les options politiques divergent, ce qui en cette période de durcissement social, peut entraîner de lourdes dissensions. Alors, comment créer des alliances sans se faire absorber ? Sans perdre le message essentiel. Sans se désunir pour autant.
Des féministes, un des groupes de travail en avait identifié trois types : les opportunistes, les passionnés... et les traumatisées !On l’aura compris, bien que studieuse, l’ambiance n’était ni triste ni aggressive.