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Les Mains bleues voient rouge

jeudi 30 septembre 2004, par Joëlle Palmieri


Le 4 septembre dernier, Les mains Bleues, l’association des anciennes ouvrières de chez Levi’s, membres de Femmes en réseau, inauguraient leur site web.
Elles en profitaient pour se présenter, jouer des extraits de leur dernière création théâtrale, lire des passages de leur livre en cours d’écriture, offrir un repas généreux, danser.. Bref, faire la fête.
Hélas ! Malgré les centaines d’invitations envoyées, ni les élus, ni les camarades de lutte n’ont fait le déplacement.

15 kilos de haricots verts frais à écosser, 10 kilos de pommes de terre à éplucher, 96 œufs à rendre durs, 5 kilos de taboulé à fabriquer, 5 kilos de riz, autant de pâtes, une bonne dizaine de gâteaux de 1200 cm2 de surface décorés à l’effigie de l’association, 5 kilos de viande, rosbif, poulet, rôti de porc, … trois frigidaires de plus et deux ventilateurs sur pied pour conserver le tout. Voilà comment les Mains bleues entendent recevoir. Nous étions le 4 septembre, cela se passait à Loos-en-Gohelle dans le Pas-de-Calais, et les anciennes ouvrières de chez Levi’s, profitant de l’inauguration de leur site (mains-bleues.org), s’étaient vues confiées une carte blanche par leur hôte de toujours, Culture commune. Une occasion qu’elles n’ont pas laissé envoler. Elles ont investi chaque millimètre carré de cette ancienne mine. Dans la grande salle de répétition, elles ont punaisé, parfois à coups de marteau, une expo : le travail à l’usine, la lutte, les ateliers d’écriture, la première représentation théâtrale pour certaines et enfin les perspectives, le projet d’estaminet. Dans la petite salle, les anciennes douches, elles ont dressé quelques tables et un buffet. Dans la cuisine, elles ont préparé les salades, les plateaux. Dans la salle qui sert d’entrepôt, elles ont entassé la nourriture, dans des frigos et des tables de fortune. Sur la scène, tour à tour, à partir de 19h, elles sont venues se présenter, se représenter, jouer (leur prochain spectacle démarre une tournée dans la région à partir de mi-septembre), parler de leurs désirs, leurs actions, exprimer leurs sentiments, leur détresse et leur joie, mettant un point d’orgue à l’organisation du bouquet final : platines, DJ et vynils pour un bal populaire sur les airs de Cloclo, C. Jerome, Desireless et de bien d’autres.

Oubliées ou ignorées ?

Arrivées la veille à 9h, Michèle, sa mère, Nadine, Patricia, Dominique, Thérèse, Brigitte, Corinne… se sont ainsi affairées sans relâche et en plein cagnard pour offrir aux 200 invité-es attendu-es ce qu’elles avaient de meilleur. Comme toujours. A leur plus grand regret, tout le monde n’était pas au rendez-vous, dont les élus – Culture commune est géré par 48 villes - et les « copains » de MetalEurope pour lesquels elles avaient donné une représentation de soutien peu de temps auparavant. Pourtant 1800 invitations sont parties, sans compter les annonce-presse diffusées par mail. Alors pourquoi ne sont-ils pas venus, se sont-elles demandées toute la soirée ? Quel gâchis ! Comment allons-nous entrer dans nos frais ? Les Mains bleues ont en effet tout organisé bénévolement, ont certes bénéficié gratuitement de toute l’infrastructure, de la boisson et d’un faible pécule, offert par les responsables du lieu qui inauguraient leur saison théâtrale, mais c’est dans leur porte-monnaie qu’elles ont cherché les euros qui manquaient pour payer boulanger, pâtissier et traiteur pour la viande. Certaines sont démobilisées. Pourquoi faire tout ça ? D’autres sont révoltées. « On va pas les lâcher comme ça ! ». Cette négligence, ce mépris, sont-ils le dur sort de femmes en lutte ?

P.-S.

Joelle Palmieri
7 septembre 2004

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