Un sujet délicat fait actuellement l’objet de satire dans une affiche qui représente la manière la plus efficace de "dire non" aux règles. Cette approche satirique s’attaque de façon subtile à une affiche qui sensibilise tout simplement à son environnement.
"C’est une des faces cachées du monde féminin, dit Jana Stepanova, la graphiste et organisatrice du thème de exposition. Nous voulons révéler un élément très naturel du monde féminin, exprimer les opinions de nos artistes et marquer les esprits de nos visiteurs".
Drôle… et politique !
Cette manifestation est sans aucun doute marquante, souvent à travers des détails graphiques. Plus de 60 tableaux, dessins, photographies et objets bizarres scrutent les menstruations de façon clinique, sanglante et malicieuse, avec un humour excentrique et une grande imagination. Les travaux sont à la fois littéraux, symboliques, choquants, politiques et imaginatifs. De plus, ils reflètent des questions plus vastes relatives au genre que les organisateurs souhaitent soulever dans le cadre de leur exposition.
Le but principal de l’exposition est de présenter le corps de la femme en-dehors du contexte du désir masculin. L’idée est d’examiner ce qui se passe à l’intérieur de chaque femme, comment elle perçoit sa féminité et comment elle vit cette existence de femme. "Il est important de parler de ce que cela apporte aux femmes et aux hommes, comment cela se reflète dans leurs vies et quel genre de questions cela évoque en eux", dit Alena Kralikova, coordinatrice de l’exposition et directrice responsable des programmes éducatifs pour le compte de son principal parrain, l’Institut des Études sur le Genre.
Plus généralement, cette manifestation construit aussi un lien entre la population féminine dans les sociétés du monde entier. "L’exposition représente l’histoire et l’évolution de l’espèce humaine en rapport avec l’histoire et l’évolution des menstruations dans plusieurs cultures", souligne Kralikova. Les fausses taches de sang animent les discussions.
Un Institut précurseur
Soulever ces questions et ces idées se rapproche du travail plus vaste de l’Institut des Études sur le Genre, créé en 1991 en République Tchèque. Cet institut a été la première organisation féminine postcommuniste, qui s’est concentrée sur les rôles des hommes et des femmes en politique, dans les affaires, dans l’éducation et dans la société. "Le but principal étant de faire des études sur le genre à un niveau académique ", précise Kralikova. Entre 1992 et 1998, les cofondateurs de l’institut, groupe constitué notamment de la sociologue Jirina Siklova, ont commencé à enseigner les tout premiers cours de genre dans les universités tchèques. "Si l’institut ne l’avait pas fait, ce sujet ne serait toujours pas enseigné dans les universités tchèques aujourd’hui", affirme Kralikova.
L’institut s’est agrandi et compte aujourd’hui 10 salariés, qui travaillent essentiellement sur l’éducation du public aux questions féministes. "Le but principal du mouvement féministe est l’égalité dans tous les domaines", dit Kralikova. Presque chaque femme est féministe à sa façon ". D’ailleurs, l’institut parraine une série de conférences chaque mardi soir, organise des expositions sur différents thèmes tels que les femmes dans l’art et la littérature, et a ouvert une bibliothèque de livres en tchèque et en anglais sur plusieurs sujets liés aux femmes et au genre.
Artistes en liberté
L’idée de l’exposition actuelle a germé en hiver 2002, lors d’une discussion entre plusieurs membres de l’institut qui voulaient organiser une petite manifestation artistique pour un cercle d’amis. Les artistes femmes et hommes ont montré tellement d’enthousiasme, que l’idée de faire une exposition à grande échelle, avec l’aide de la Gallery Art Factory, s’est développée. Le thème a été donné aux artistes, qui ont ensuite produit des œuvres d’art qui expriment leur propre vision du sujet. "On n’avait imposé aucune limite aux artistes, souligne Kralikova, ce qui importait, c’était l’approche et l’originalité".
L’exposition a même intégré la mode d’une certaine façon, sous forme de pièces créées par l’artiste Jitka Zabkova, qui a utilisé des serviettes hygiéniques pour fabriquer un maillot de bain et une robe. Cette manifestation prévoit également une projection spéciale d’un documentaire sur une manifestation tenue ici à la fin des années 80 pour protester contre la pénurie de serviettes hygiéniques. (Ce film sera diffusé Mardi 10 février, à 5h de l’après-midi et sera suivi d’un débat).
Les hommes font aussi partie de la manifestation. "Nous pensons que les hommes seront autant intéressés par cette question que les femmes, et nous avons donc essayé de leur en faciliter l’accès", dit Kralikova. Les visions des hommes se manifestent pendant l’exposition sous forme de tableaux de Vénus et d’Adam et Eve par Roman Franta, qui a mélangé son propre sang à la peinture, ou bien une aquarelle sur l’approche scientifique d’un cycle menstruel par Stanislav Divis.
Quelle que soit la qualité de ces œuvres d’art, il ne fait aucun doute que l’institut a présenté un sujet provocant de manière amusante et instructive. C’est une approche unique de ce genre de questions qui font petit à petit surface dans cette région du monde et qui vont certainement pousser les gens à parler. Tel est exactement le but. Alors, ne restez pas en-dehors de la conversation.
L’article est paru dans The Prague Post du 5 février 2004.
Traduction de l’anglais par Rachida Toudert-Benbekhti