À l’occasion de l’atelier « Femmes et eau » organisé par son association, Jean Grossholtz a répondu à nos questions.
Pourquoi l’eau est un enjeu si important ?
Parce que les gouvernements occidentaux essayent d’inclure l’eau dans les négociations du Gatt. Et une fois que ce sera fait, ce sera pour toujours. Il sera impossible de revenir en arrière. Si l’on définit l’eau comme un service au sens des accords du Gatt, cela veut dire que l’eau devient un produit achetable et vendable par n’importe quelle multinationale. Déjà, les pays qui ont besoin de liquidités pour parer au plus urgent, vendent leurs services publics aux grandes entreprises. Mais il y a encore près de 90% de la distribution de l’eau qui est géré en service public, d’où l’appétit des multinationales. Aujourd’hui, la question de l’eau est la plus urgente car c’est une question essentielle. Sans eau, en trois jours, une personne meurt. Ce n’est absolument pas une commodité ; c’est un droit humain
Pourquoi les femmes sont-elles particulièrement concernées ?
Parce que dans la plupart des pays, ce sont elles qui ont en charge la question de l’eau. Ce sont elles qui doivent marcher des kilomètres toutes les semaines pour faire boire leur famille. Il ne faut pas oublier que dans de nombreux pays, le réseau de distribution est vraiment misérable. De plus, une partie des rivières et cours d’eau ont été asséchés par les puits de forage de plus en plus profonds creusés par les grandes compagnies.
La situation semble sans espoir…
Cette conférence est une raison d’espérer dans ce cirque qu’est le Forum social mondial. Les gens viennent, essayent de se comprendre et de prendre de l’information. C’est important car aujourd’hui, nous avons un mouvement sur l’eau qui est mondial et capable d’organiser une riposte. Par exemple, en Inde, nous sommes allés à Haridwar dans l’une des villes les plus sacrées, là où le Gange prend sa source. Il y a un projet mené par la compagnie française Suez de détournement de cette eau pour approvisionner New Delhi. Déjà le processus est bien avancé, mais la résistance aussi. Les habitants de ces Etats pauvres de l’Inde ne veulent pas se laisser spolier et ils sont prêts à se battre pour empêcher ça. Pas seulement pour l’eau elle-même, mais pour ce qu’elle signifie pour eux. Et nous gagnerons en résistant ensemble, dans la rue, pas en allant négocier du côté des Parlements.