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Une loi d’exception pour les femmes originaires de pays musulmans...

Allons-nous laisser faire ?

samedi 30 août 2003, par Dominique Foufelle

En France, la politique d’immigration est sexiste. Les codes de la famille ou du statut personnel du pays d’origine peuvent s’appliquer à certaines femmes immigrées (Turquie, Algérie, Maroc, …), à la demande du conjoint. Les femmes étrangères non régularisées par leur mari, dans le cadre du regroupement familial, se retrouvent, en cas de divorce, en situation d’être expulsables, le mari étant le seul à garder un droit de séjour.

La polygamie est tolérée de fait quand les pères sont les seuls autorisés à toucher les allocations familiales pour les enfants issus d’unions non reconnues avec des femmes maintenues dans l’irrégularité.
Le recours à la grossesse programmée est souvent le seul moyen pour les femmes arrivant seules d’éviter l’expulsion et d’obtenir des papiers.
Pour la régularisation des hommes, les femmes d’origine étrangère, mais de nationalité française, sont utilisées et se voient imposer le mariage arrangé ou forcé.
Le marché international des agences matrimoniales prospère en exploitant les aspirations des candidates à l’immigration. Ce marché répond à une demande des hommes de reprendre leur position dominante dans les rapports avec les femmes, considérées comme trop émancipées en Europe. Le trafic et l’exploitation des prostituées étrangères s’appuient sur les mêmes mécanismes : trahison des aspirations des femmes et mise à disposition de femmes sous tutelle et dociles.

La politique d’immigration a fait le lit des islamistes, qui ont investi les zones désertées par les pouvoirs publics. Les filles et les femmes du mouvement " Ni pute, ni soumise " ont bien dénoncé l’enfermement dans les quartiers, la stigmatisation des filles, la pression et la violence qu’elles subissent. Elles rappellent que les élus n’ont pas soutenu celles et ceux qui avaient un projet laïque et démocratique, préférant consolider la place des "grands frères" pour les canaliser. Les organisations islamistes, de même obédience que l’U.I.O.F. (grande gagnante de la consultation nationale), sont très actives dans les quartiers. Les islamistes savent utiliser les misères sociales et économiques et le fonctionnement démocratique pour recruter et prendre du pouvoir. L’islamisation des esprits gagne du terrain. Mr Sarkozy n’a-t-il pas lancé un appel aux Imams du pays pour calmer les esprits des garçons sous leur contrôle, avant la guerre contre l’Irak !
Aujourd’hui, en contrepartie de la paix sociale dans les quartiers, la discussion est ouverte au niveau local avec ceux qui voudraient faire évoluer la loi de 1905 et obtenir des financements publics pour les activités culturelles et sociales des lieux de culte.
Au niveau international, les islamistes participent aux rencontres des organisations internationales et tiennent la même position que le Vatican sur la contraception, l’avortement et l’homosexualité. Reconnus comme de " bons élèves " en économie libérale et en technologie réseau, ils peuvent comme les turcs l’ont fait, afficher leur programme de gouvernement : " Rigoristes pour la famille (traduire pour les femmes) et libéraux pour l’économie ".
Ce projet de société est partagé avec l’extrême droite européenne, qui s’accorde avec les intégristes sur la mise sous tutelle et en dépendance économique des femmes et sur le racisme et l’antisémitisme.

L’intégrisme religieux s’engouffre aujourd’hui dans le vide idéologique laissé par l’effondrement du communisme et le consumérisme ; les pressions politiques des religieux sont utiles pour mener à bien la mondialisation des marchés et les régressions sociales et culturelles indissociables.
Les partis de gauche et les mouvements pour une autre mondialisation ne veulent pas s’attaquer de front à l’avancée des idées intégristes, islamistes en particulier, et s’interroger sur la conception néo-colonialiste qui prévaut dès qu’il s’agit de l’application de la charia à l’égard des femmes.

Veut-on oublier, encore aveuglé-e-s par la peur des talibans, que les iranien-ne-s vivent depuis 20 ans sous le joug d’un ministère du Vice et de la Vertu ?
Veut-on oublier que les barbus algériens, entraînés en Afghanistan pour créer la terreur, ont été remis en liberté et sont représentés dans le gouvernement algérien ?

Pour toutes ces raisons, en solidarité avec les femmes qui se sont révoltées, qui suffoquent sous le voile, qui sont mortes de l’avoir refusé ; celles qui luttent aujourd’hui pour s’en libérer (au sens propre et figuré), il est urgent de refuser la normalisation du port du foulard pour les filles d’origine de pays musulmans.
Les conséquences sont nombreuses et douloureuses, contraires à toute idée d’émancipation et de libération pour elles et pour les autres. L’exception française sur la laïcité peut voler en éclat sous la pression des intégristes religieux.
C’est la mixité de l’espace public qui est mise en question tout autant que la laïcité. Notre idéal de liberté et d’égalité est universel et ne peut faire l’objet de compromis douteux au nom du respect des particularismes culturels.
N’oublions pas l’effet " Ben Laden " sur les garçons et la montée du racisme anti-arabe, que subiront de plein fouet les filles stigmatisées par le voile, ce qui aboutirait à l’exclusion et l’enfermement recherchés.

Comment rejoindre les femmes issues de l’immigration, laïques et démocrates, féministes, pour faire entendre nos voix ?

P.-S.

Chantal Melliès – août 2003

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