Elles sont venues de pays frappés par la misère ou la guerre (dont les femmes sont souvent les premières victimes), fuyant des violences familiales, politiques ou religieuses, des contraintes devenues intolérables, ou aspirant à vivre plus librement et à gagner leur vie par leur travail.
D. a quitté le Maroc, elle était femme de ménage ; ses employeurs lui ont proposé de venir travailler en France. Seule avec un enfant, une famille très pauvre, c’était une possibilité d’envoyer de l’argent. Plus de 15 ans ont passé. D. comme la plupart des sans papières, fait des ménages ; d’autres gardent des enfants, s’occupent de personnes âgées ; d’autres travaillent dans des restaurants, dans des ateliers. Précaires, souvent surexploitées, ces femmes contribuent à la société et à l’économie françaises, mais elles ne sont pas reconnues comme travailleuses.
D’autres veulent rejoindre des proches vivant déjà en France, mais les conditions du regroupement familial sont très strictes, et la notion de vie privée et familiale guère reconnue. M. a en France son oncle et tante, son compagnon, leur enfant né en France : refus de titre de séjour, invitation à quitter le territoire…
La loi française entérine et reproduit des situations de dépendance conjugale : quant on obtient un titre de séjour en raison de son mariage (avec un français ou un résident étranger), en cas de rupture dans les premières années de la vie commune, le titre de séjour n’est pas renouvelé. Si une femme subit des violences, elle ne peut s’en libérer : elle perdrait son droit au séjour. F., marocaine, s’est mariée à un compatriote résidant en France, il lui a promis monts et merveilles, elle a vendu sa boutique et l’a rejointe, avec un visa de tourisme, car il assurait que c’était plus facile ainsi. Depuis deux ans, quasiment séquestrée, battue, son mari refusant de tenter les démarches de régularisation par regroupement familial, elle est sans papiers. Elle ne peut rentrer, car elle n’a plus rien, et sera mal reçue par sa famille qui désapprouvait son mariage. Elle veut divorcer, vivre en France… Au mieux, elle sera sans papiers pendant 8 ans encore !
Encore un autre exemple de la façon dont les droits des femmes peuvent être bafoués : des jeunes filles résidant légalement en France peuvent être incitées ou contraintes à retourner dans le pays d’origine pour s’y marier. Au bout de trois ans, leur carte de résident n’est plus valable. Si elles réussissent à rompre cette union non choisie et à revenir, parfois des années plus tard, elles sont sans papiers. M. a vécu cela. Maltraitée par son mari, elle revient en France, avec son petit garçon, et retrouve ses parents. Mais le mari envoie un de ses frères qui enlève l’enfant, et exige de la justice algérienne qu’elle respecte l’obéissance exigée des femmes, au nom du Code de la famille (il faut rappeler que le statut personnel du pays dont on a la nationalité peut s’appliquer en France…). M. résiste, elle obtient de la justice française la séparation et la garde de l’enfant, pendant que le ministère de l’intérieur lui refuse les papiers et lui envoie un arrêté de reconduite à la frontière. Elle est sans papiers, pour combien de temps encore ? Son fils lui sera-t-il rendu ?
La majorité des personnes réfugiées dans le monde sont des femmes et des enfants. Mais ce n’est certes pas en France qu’elles et ils sont accueilliEs ! La restriction du droit d’asile touche aussi les femmes. D’abord il faut pouvoir atteindre le territoire français. Et pour avoir une chance d’être reconnue comme réfugiée, il faut apporter les preuves de persécutions effectives, graves et personnelles, alors que la Convention de Genève considère comme réfugiée toute personne ayant une crainte fondée de persécution, pour diverses raisons, dont son appartenance à un groupe social (par exemple le fait d’être une femme !). L., menacée de mort ainsi que ses enfants en Colombie, à cause de la violence qui règne dans ce pays et des activités de son mari, se voit ainsi refuser le droit d’asile
Quant au quotidien d’une femme sans papiers, laissons la parole à S, camerounaise : " sans droits, sous la dépendance d’un patron ou d’un compagnon, sans existence en tant qu’individu autonome et capable, en butte à l’angoisse permanente, à des troubles psychosomatiques ou à des descentes aux enfers provoquées par des proxénètes sans scrupules… La femme sans papiers est ainsi la cible des exploiteurs et profiteurs de tous bords. Une cible sans défense réelle, sinon ses propres ressources intérieures "
Qu’elles puissent aussi compter aussi sur notre solidarité à toutes et tous !